Et si l’humanité s’offrait vingt ans de gouvernance féminine ?


Introduction

Depuis des millénaires, l’humanité est dirigée presque exclusivement par des hommes. Cette réalité n’est ni une opinion ni une exagération militante : c’est un fait historique massif, documenté, constant. Des empires antiques aux États modernes, des monarchies aux républiques, le pouvoir politique, militaire, économique et symbolique est resté une affaire masculine. Le monde tel qu’il existe aujourd’hui est le produit direct de cette gouvernance prolongée. Or, ce monde est marqué par des guerres incessantes, une course aux armements, la destruction accélérée de la nature, l’exploitation des autres espèces vivantes et la généralisation de systèmes de domination — racisme, sexisme, colonialisme, exploitation sociale. Il est légitime, face à ce constat, de poser une question radicale : et si le problème n’était pas seulement les politiques menées, mais ceux qui gouvernent depuis toujours ?

Un diagnostic historique sans détour

Les grandes catastrophes humaines ne sont pas des accidents isolés. Elles s’inscrivent dans une continuité politique et culturelle fondée sur la conquête, la compétition, la domination et la force. Ces valeurs ont structuré les États, les économies et les relations internationales. Elles ont aussi façonné les sociétés de l’intérieur, en hiérarchisant les êtres humains selon le genre, l’origine, la classe ou la couleur de peau. La domination masculine est le socle sur lequel se sont construites toutes les autres dominations. Pendant que les hommes décidaient, les femmes étaient exclues, réduites au silence, confinées aux marges ou instrumentalisées. Cette exclusion n’a jamais été réparée à la hauteur du préjudice historique subi.

L’échec des solutions progressives

Depuis plusieurs décennies, des politiques de parité, de quotas et de discrimination positive ont été mises en place dans de nombreux pays. Elles ont permis une meilleure visibilité des femmes dans les institutions : assemblées, gouvernements, conseils locaux. Mais cette présence n’a pas débouché sur un pouvoir réel équivalent à celui exercé historiquement par les hommes. Les femmes sont souvent minoritaires dans les postes décisifs, contraintes par des cadres conçus par et pour les hommes, soumises à des rapports de force inchangés. La parité numérique ne s’est pas traduite par une transformation profonde de la manière de gouverner. Le système absorbe les femmes sans se transformer. Elles sont là, mais le pouvoir reste masculin dans sa logique, ses priorités et ses méthodes.

La nécessité d’une rupture radicale

Lorsque toutes les solutions graduelles échouent, la rupture devient une option rationnelle. Continuer à ajuster un système qui produit les mêmes résultats depuis des siècles relève de l’aveuglement. Il ne s’agit plus d’aménager la domination masculine, mais de la suspendre. La proposition est simple, claire et radicale : inscrire dans la Constitution l’interdiction faite aux hommes de diriger les affaires publiques pendant une période limitée de vingt ans. Cette interdiction concernerait l’ensemble des niveaux de pouvoir : présidence, gouvernement, Parlement, mais aussi collectivités locales — conseils municipaux, départementaux et régionaux. Durant cette période, toutes les élections politiques seraient ouvertes exclusivement aux femmes.

Une expérimentation politique sans précédent

Cette mesure n’est ni punitive ni revancharde. Elle est expérimentale. Elle vise à tester, pour la première fois dans l’histoire humaine, ce que donne un pouvoir exercé exclusivement par des femmes, sans tutelle masculine, sans domination structurelle, sans obligation de se conformer à un modèle viril du leadership. Vingt ans représentent un cycle politique suffisant pour observer des transformations profondes : dans les politiques publiques, les priorités budgétaires, les relations sociales, la gestion des conflits, le rapport à la nature et au vivant. C’est le temps nécessaire pour juger, comparer, évaluer honnêtement.

Des effets potentiels sur la gouvernance

Un pouvoir féminin réel pourrait produire des résultats majeurs : une réduction des logiques guerrières au profit de la diplomatie et de la prévention des conflits ; une réorientation des politiques publiques vers la santé, l’éducation, la protection sociale et l’environnement ; une gouvernance plus horizontale, moins autoritaire, plus inclusive. Il ne s’agit pas d’idéaliser les femmes ni de les présenter comme moralement supérieures, mais de reconnaître qu’une expérience historique radicalement différente peut générer des choix différents. L’absence de compétition virile permanente pourrait libérer de nouvelles formes de coopération politique.

Un levier de transformation sociale et culturelle

Au-delà des institutions, une telle mesure aurait un impact culturel considérable. Elle modifierait profondément les représentations du pouvoir, de l’autorité et de la légitimité. Les générations futures grandiraient dans un monde où le pouvoir politique est exercé par des femmes à tous les niveaux, sans exception. Cela réduirait durablement les biais de genre, renforcerait la confiance des femmes dans leur légitimité à gouverner et désactiverait les mécanismes de domination intériorisés. Ce serait un bouleversement symbolique aussi important que l’instauration du suffrage universel.

Une réparation historique assumée

La domination masculine est la plus longue et la plus massive discrimination de l’histoire humaine. Elle a privé la moitié de l’humanité du droit de décider pour elle-même et pour le collectif. Suspendre temporairement l’accès des hommes au pouvoir politique est une mesure de réparation, proportionnée à l’ampleur du préjudice subi. Contrairement aux discriminations subies par les femmes, cette suspension serait limitée dans le temps, encadrée constitutionnellement et justifiée par l’intérêt général. Elle ne nie pas l’égalité des droits ; elle cherche à la rendre enfin réelle.

Une mise en œuvre démocratique

Une telle transformation ne peut être imposée. Elle devrait faire l’objet d’un référendum ou d’un large consensus démocratique. Aucun dogme, aucune idéologie préconçue ne doit guider cette décision, mais une question simple posée collectivement : sommes-nous prêts à tenter autre chose ? À expérimenter une alternative radicale après des siècles d’échec ? La démocratie n’est pas figée ; elle est faite pour évoluer lorsque le réel l’exige.

Conclusion

L’humanité n’a jamais connu un monde gouverné par des femmes. Jamais. Toutes les grandes décisions, tous les grands désastres, toutes les grandes orientations ont été prises dans un cadre de pouvoir masculin. Continuer à prétendre que le problème n’est pas structurel relève de la mauvaise foi. Interdire temporairement aux hommes de diriger les affaires publiques n’est pas une fin en soi ; c’est un moyen. Un moyen de tester, de réparer, de transformer. Pendant vingt ans, laisser les femmes gouverner réellement, pleinement, sans partage. Puis regarder honnêtement les résultats. Si l’objectif est un monde plus juste, plus pacifique et plus durable, alors il est temps d’oser l’inédit.

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